l’Europe en particulier se rend compte qu’elle n’est plus souveraine, économiquement (dépendante de la Chine), énergétiquement (dépendante de la Russie), territorialement (dépendante de l’OTAN). Elle est confrontée à deux événements conjugués qui vont redessiner les contours d’un nouveau monde.

L’occident ne sera jamais affaibli par des événements ou des drames externes, il a l’intelligence et les moyens pour y faire face. Ni par la guerre, il en est le principal provocateur, il a l’arme nucléaire pour dissuader ses ennemis, il est fabricant et vendeur d’armes pour maintenir les conflits. Ni par le réchauffement climatique, il en est la cause avec la croissance des soixante-dix dernières années et le mode de consommation effréné de ses citoyens qu’il ne veut pas contraindre. Ni par la pandémie, ses laboratoires pharmaceutiques développent les vaccins en un temps record ; ils l’ont démontré avec la Covid19.
Sa déstabilisation éventuelle, si elle arrivait, viendra des erreurs de ses dirigeants. Les risques qui les guettent sont de nature comportementale et psychique. Le premier est ‘le virus homme blanc’ supérieur à l’homme de couleur, qu’il perpétue en Afrique particulièrement. Le deuxième est l’exploitation des richesses naturelles de l’Afrique en contrepartie d’un soutien aux pouvoirs répressifs ‘gérontocratiques’. Le troisième est son alignement aveugle sur la politique des États Unis d’Amérique sous le motif du partage de valeurs démocratiques communes. Le quatrième est l’extrémisme affiché et toléré de leaders et de partis politiques racistes (Trump, Le Pen, Orban, Zemmour, ..). Le cinquième enfin, est l’islamisme qu’il combat au Proche Orient et en Afrique, qu’il respecte et honore avec les régimes monarchiques du pétrodollar, qu’il ne contrôle plus ou qu’il laisse prospérer avec la complicité des partis islamo-gauchistes, dans ses banlieues.
L’analyse des raisons de la ‘panique et de la peur’ de l’occident ces derniers temps, tend à montrer, qu’effectivement, la source de son mal se trouve chez ses gouvernants. Ils ont commis deux erreurs stratégiques révélées par la Covid19 et la guerre d’Ukraine.
La première erreur est la mondialisation : l’occident mené par les financiers et les multinationales, comme toujours, a laissé se développer une ‘mondialisation sauvage’ qui les a enrichis en appauvrissant encore plus les pays fragiles. Dans certains cas, il l’a imposé avec la complicité ou grâce à l’OMC. Justement qu’est-ce que la mondialisation ? C’est ouvrir les frontières de tous les pays pour que les entreprises trouvent l’endroit pour produire et acheter le moins cher sur la planète et ensuite vendre sans frais de douanes. C’est trouver des pays des bas salaires, de l’ignorance du droit du travail, des conditions de travail ‘esclavagistes’, du non-respect des contraintes environnementales, des impôts réduits et des charges sociales allégées, de l’absence d’assurance chômage, etc.
A la fin des années soixante-dix, la Chine réunissait toutes les conditions d’un ‘pays à bas coûts’, considérés comme des atouts pour attirer les entreprises occidentales. Ces dernières ont effectivement profité de ‘la nouvelle Chine’ libéralisée par Deng Xiaoping. Elles ont délocalisé massivement leur activité manufacturière pour en faire ‘leur usine à bas coûts’. Les deux parties, Chine et occident, étaient gagnantes économiquement ; et la Chine était devenue l’allié économique stratégique. Ceci, durera tant qu’elle restait ‘faible’ et qu’elle répondait à leurs exigences, ‘en claquant des doigts’.
Mais cette Chine des années quatre-vingt, s’est métamorphosée en cinquante ans. Elle est aujourd’hui la deuxième puissance économique mondiale derrière les USA, délogeant le Japon en 2010. Maintenant, elle fait ‘même peur’ aux USA et à l’Europe, les prévisions la placerait première puissance mondiale d’ici 2040. Un événement à mis à l’épreuve le rapport de force occident – Chine l’année dernière, la Covid19. Pendant la période récente de la pandémie qui dure encore en Chine, le gouvernement a adopté la stratégie Zéro Covid. L’application de cette stratégie consiste à confiner toute la région dans laquelle apparaît un seul cas de Covid. Plusieurs centres industriels, poumon économique de la Chine, sont restés fermés pendant des mois, réduisant ainsi sa capacité de production. Cette stratégie a créé des problèmes graves aux entreprises occidentales qui ont repris leur activité sans contraintes de confinement depuis la mise des vaccins sur le marché. Les entreprises chinoises ne répondent plus aux exigences de leurs clients occidentaux, comme avant. Avec son poids politique et économique, la Chine choisit et impose ses priorités. Elle satisfait, en premier, sa demande interne et retarde la demande externe. Les multinationales se trouvent ainsi bloquées et contraintes d’arrêter leurs usines par manque de pièces fabriquées en Chine. Elles se sont rendues compte de leur dépendance de la bonne volonté des Chinois.
En voici quelques exemples de la dépendance de l’occident vis-à-vis de la Chine : les constructeurs automobiles avaient arrêté les chaines de montage par manque de semi-conducteurs qui étaient fabriqués en chine. Les délais de livraison d’un nouveau véhicule dépassent les 8 mois ; ce qui a fait flamber le prix des voitures d’occasion. Dans les entreprises pharmaceutiques, 60% des composants des médicaments venaient de Chine et d’Inde, il y eut une rupture de stocks de certains médicaments dans les hôpitaux. Au début de la pandémie, les masques étaient introuvables sur le marché, la Chine était le principal producteur auquel s’adressait toute la planète, etc
La Chine n’est plus ‘l’usine à bas coût’ du début de la mondialisation : elle a augmenté les salaires avec la croissance du PIB ; elle dépasse les européens sur certaines technologies ; elle innove autant voire plus que les occidentaux. L’occident doit payer plus cher les pièces, qu’auparavant. Il ne trouve plus ses intérêts, il doit trouver une solution alternative à la Chine.
La deuxième erreur stratégique est la confiance de l’Europe en La Russie : Les USA et l’Europe pensaient être en paix sur leurs territoires. Les voilà confrontés à un conflit inattendu, une première guerre en Europe depuis 1945. Était-elle prévisible ? Oui. La Russie de Poutine, avait annexé la Crimée, détruit et repris la Tchétchénie, annexé l’Ossétie, détruit la Syrie. Les USA et l’Europe n’ont apporté assistance à aucun de ces pays. Toutes ces guerres, ne les ont pas alertés sur les intentions de Poutine. Pire, l’Allemagne, et quelques autres pays européens, ont fait de la Russie le fournisseur de gaz unique. Comment est-ce possible ? C’est la deuxième erreur stratégique de l’Europe qui devient dépendante de la Russie énergétiquement, aujourd’hui ‘ennemie’. A l’approche de l’hiver, l’Europe doit faire face à l’une des situations les plus graves depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.
L’occident dont l’Europe en particulier se rend compte qu’elle n’est plus souveraine, économiquement (dépendante de la Chine), énergétiquement (dépendante de la Russie), territorialement (dépendante de l’OTAN). Elle est confrontée à deux événements conjugués qui redéfiniront les contours d’un nouveau monde économique et géostratégique. Celui d’un monde occidental face à un nouveau monde en construction qui sera composé de la Russie et de la Chine, aidées de la Corée du Nord, de la Turquie, de l’Iran….et l’Afrique dans tout cela ?
Les contours du nouveau monde. Prochainement.
Saïd HAMICHI